Librairie des Signes : l'indépendance au cœur des passions

Indépendante, la Librairie des Signes de Compiègne a été impactée par la crise sanitaire, à l'image du secteur. Malgré un combat quotidien, Camille Defourny et son équipe font de ce lieu, un lieu ouvert à tous, de partage et de richesses littéraires... Post confinement, cette indépendance dans le secteur culturel est devenue, pour l'heure, une force.

Camille Defourny (au centre) et sa jeune équipe.
Camille Defourny (au centre) et sa jeune équipe.

Elle existe depuis 21 ans. À l’heure du numérique et des géants de la culture, cette librairie compiégnoise continue son chemin, reprise par Camille Defourny il y a quatre ans, libraire passionnée par son métier depuis plus de 15 ans. Amazon n’est pas une fatalité… Petit dans le monde des livres, la librairie indépendante est pourtant la porte d’entrée à une culture de proximité dont les maîtres mots sont service et écoute. Mais cette indépendance a un prix : ce type de librairie n’est rentable qu’en fin d’année : marges très faibles, coûts élevés et remises faibles de la part des fournisseurs sont autant de causes qui, selon Camille Defourny, est un problème de « redistribution de l’argent ».

Puis il y a eu le confinement lié à la crise de la Covid-19. Selon l’Observatoire de la librairie, la fermeture administrative de ces établissements a entraîné une chute d’activité estimée au niveau national à 93,5% par rapport au printemps 2019. Si le retrait et la livraison de commandes ont été autorisés, un peu moins de la moitié des 3 300 libraires indépendants de France ont choisi cette solution, le chiffre d’affaires dégagé étant symbolique dans 90% des cas. En réponse à cette crise majeure, le Gouvernement a notamment créé un fonds de soutien de 25 millions d’euros et facilité l’accès aux Prêts garantis par l’État (PGE). Fin mai, 729 librairies et 298 maisons d’édition avaient bénéficié de ce dernier dispositif pour un total de 115 millions d’euros (source ministère de l’Économie). « À partir de ce moment-là, oui nous avons pu avoir une bouffée d’oxygène et prévoir davantage, explique Camille Defourny. Le travail collectif entre le CNL, le CNE et du syndicat des libraires a fait avancer la situation ».

Du côté de la rentrée littéraire, elle s’annonce tout aussi foisonnante que les précédentes : 500 livres en 2020 contre 524 en 2019.

Retour dans les librairies !

Presque trois mois après le déconfinement, l’heure est aux premiers bilans… et les librairies indépendantes retrouvent leurs lettres de noblesse. « Il y a eu un avant et après confinement et de façon très nette, constate la gérante de la Librairie des Signes. Avant, il y avait une centaine de recherches mentionnant “librairie indépendante Compiègne” et juste après le déconfinement, ce chiffre est monté à 1 000 ». Un retour des valeurs, du plaisir et un nouveau regard sur son quotidien… la culture suit le mouvement de la consommation générale des citoyens, qui se veut davantage locale. « Je pense qu’il y a eu une prise de conscience, vraiment. Et puis, pendant le confinement, les gens ont lu, c’est la culture qui a fait tenir cet enfermement et qui a permis de s’évader, de tenir le choc et de survivre », médite Camille Deforny.

Du côté du bilan de la reprise, finalement, la tendance est positive. « Je ne le pensais pas mais les gens sont venus plus nombreux dans la librairie et dès le premier jour du déconfinement, se souvient-elle. À tel point que j’ai vendu comme au mois de décembre en juin et depuis juin la tendance n’a pas baissé. C’est la cavalcade !». Et pour les plus dubitatifs, le prix d’un livre est le même partout, dans une librairie ou sur une plate-forme Internet géante, depuis la loi Lang en 1981 (relative au prix unique du livre)… pour justement protéger les librairies indépendantes.

Cette nouvelle tendance convainc davantage Camille Defourny sur le métier de libraire. « C’est un métier d’avenir. Les livres sont une source de culture et d’enrichissement incroyable. Et nous vendons aussi des livres numériques, nous sommes ouverts à toutes les formes », sourit-elle.

Un lieu ouvert à tous

À la librairie des Signes, cette proximité se voit à peine franchi le seuil, grâce aux sourires affichés de toute l’équipe, inspirée par la bonne humeur et l’authenticité de sa gérante. À l’intérieur, les 400 m² de la librairie recensent 40 000 références de livres… de la jeunesse, à la littérature, en passant par les mangas, les bandes dessinées ainsi que des livres sur tous les thèmes. « Pour moi, une librairie est un lieu d’échanges, ouvert à tous. Certaines personnes n’osent pas rentrer dans une librairie mais ici, nous sommes là pour conseiller, faire découvrir, confie Camille Defourny. Il n’y a pas de bonne ou mauvaise littérature, chacun lit ce qu’il aime, ce qui le fait vibrer, et nous sommes là pour conseiller les bons livres. »

Cette écoute et ce service constants émanent d’un travail coriace en coulisse. La libraire, loin d’être la douce rêveuse qui lit son livre derrière son comptoir toute la journée, transporte 200 kilos de livres par jour (hors saison) et 600 kilos les plus gros mois de vente (comme à Noël), sans compter le référencement quotidien des livres. « Il y a un côté physique dur dans ce métier, confie-t-elle. Mais c’est un métier passion et le bonheur de mes clients me procure beaucoup de plaisir. »