Filière industrielle automobile : « Le grand défi est d’être attractif pour embaucher de nouvelles compétences »

Comment les acteurs économiques de la filière industrielle automobile régionale se réorganisent pour s’engager dans le virage électrique ? Quels sont les nouveaux défis de la transition auxquels sont confrontés les constructeurs et sous-traitants ? Comment y répondre ? Rencontre avec Rodolphe Delaunay, président de l'Aria Hauts-de-France.

Rodolphe Delaunay, président de l'Aria Hauts-de-France. ©Samuel Dhote
Rodolphe Delaunay, président de l'Aria Hauts-de-France. ©Samuel Dhote

Fondé en 1996, le réseau de l’Association régionale de l'industrie automobile (Aria) Hauts-de-France est composé de constructeurs, d’équipementiers, de fournisseurs de biens d’équipement et de services, ainsi que d’universités et d’écoles présentes en Région. Tous poursuivent un objectif commun : le développement de la filière automobile régionale qui passe, aujourd’hui, par une mutation profonde.

Attirer et former les talents

En préambule, Rodolphe Delaunay a souhaité rappeler que « la Région reste la première région de production automobile de France avec 56 000 emplois et 462 149 véhicules produits en 2021, c’est une bonne nouvelle ! Trois gigafactory s’implantent et vont s’implanter sur le territoire, ACC à Douvrin, Verkor à Dunkerque et Envision à Douai, et vont apporter une valeur ajoutée supplémentaire à l’industrie automobile régionale et créer 10 000 emplois d’ici 2030. Le grand défi, désormais, c’est d’être attractif pour embaucher de nouvelles compétences. C’est une des clés sur laquelle l’Aria travaille : comment fédérer l’ensemble des acteurs et créer une offre de formation ? Comment attirer et former les talents ? L’école, la formation ou encore le logement sont des éléments fondamentaux de cette réflexion ».

Il poursuit : « Prendre le virage de l’électricité impose de gros investissements pour les constructeurs et l’ensemble des acteurs de la filière. L’enjeu est de réduire les émissions de CO2… mais il faut rappeler que la décision finale appartient aux consommateurs ! Il faut prendre en compte le coût de production et de fabrication des batteries, le coût de l’énergie dont la hausse est difficilement compensable par la productivité, ce sont des critères qu’il ne faut pas négliger. » Avec en toile de fonds, une problématique de prix de vente des véhicules électriques aux particuliers, un levier central dans la croissance attendue et souhaitée du marché de la mobilité électrique.

Un consortium autour de 40 entreprises

Vous l’aurez compris, l’industrie automobile est en pleine révolution ! À l’image des trois manufactures Renault du nord de la France, Douai, Maubeuge et Ruitz, qui se sont regroupées pour créer Renault ElectriCity, l’un des centres de production de véhicules électriques le plus important d’Europe. Et dans ce contexte, dans ce nouveau chapitre de l’histoire de l’automobile mondiale, « l’Aria accompagne et supporte le développement des gigafactory dans les Hauts-de-France. Sur la grande question du recrutement et de la formation, nous avons notamment lancé un Appel à Manifestation d’Intérêt autour d’un consortium de 40 entreprises ».

Le Projet Electro’mob a pour objectif d’anticiper et de contribuer à répondre aux besoins en emplois et en compétences de demain dans l’industrie automobile régionale, par la formation de 13 000 apprenants, un préalable indispensable pour répondre aux besoins globaux de la filière selon les estimations de l’association.

Rodolphe Delaunay ajoute : « À ce jour, l’électrique ne représente que 18% des parts de marché sur les ventes de véhicules neufs du fait de plusieurs problématiques, comme les coûts de production, le manque d’infrastructures comme les bornes de recharge… il faut donc mettre en place un business model robuste. L’implantation des gigafactory est ainsi une bonne nouvelle pour les Hauts-de-France et l’ensemble du territoire puisque cela permettra de baisser le coût de fabrication des batteries, produites pour l’instant en Asie ou en Europe de l’Est, et donc le prix des véhicules. »

La filière automobile des Hauts-de-France représente 56 000 emplois. ©Renault Group

Soutenir l’innovation

Quant au moteur thermique, est-il d’ores et déjà dans les cartons ? « L’enjeu, encore une fois, est de réduire les émissions de CO2… oui demain la voiture sera électrifiée, je ne dis pas électrique, mais je reste persuadé que le moteur thermique a encore un avenir si nous trouvons des alternatives pour avoir un carburant décarboné… c’est dans l’ADN de l’automobile ! L’hydrogène est également une alternative dans les transports en commun et les transports maritimes, explique-t-il. Il faut que tout le monde collabore pour soutenir l’innovation. Il y a encore du chemin à parcourir et je pense qu’il peut y avoir une place pour tout le monde… »

La filière automobile des Hauts-de-France

  • 1ère région de production automobile de France.
  • 7 sites de constructeurs : 4 sites d’assemblage de véhicules (Renault, Stellantis et Toyota) et 3 sites d’assemblage mécanique (moteurs et boîtes de vitesses).
  • 1 milliard d’euros investis entre 2020 et 2025.
  • 550 entreprises travaillant pour l’industrie automobile régionale.
  • 56 000 emplois (dont 6 000 emplois dédiés à la R&D).
  • 462 149 véhicules produits en 2021 (véhicules particuliers et véhicules utilitaires légers).