« Il n'y a rien d'alarmant pour les prêts garantis par l'État »

Face aux difficultés de remboursement des PGE (prêts garantis par l’État) auxquelles sont confrontées de nombreuses entreprises, le ministère de l'Économie et des Finances, en accord notamment avec la Banque de France, a prorogé le dispositif d'accompagnement jusque fin 2026. Éclairage avec Carine Jupin, directrice régionale de la Banque de France et Frédéric Visnovsky, médiateur national du crédit aux entreprises, qui préconisent l'importance de saisir les dispositifs « avant de se retrouver dos au mur ».

Carine Jupin, directrice régionale de la Banque de France et Frédéric Visnovsky, médiateur national du crédit aux entreprises.
Carine Jupin, directrice régionale de la Banque de France et Frédéric Visnovsky, médiateur national du crédit aux entreprises.

53% : c'est la part de remboursement des prêts garantis par l'Etat (PGE) à fin décembre 2023. Pour Frédéric Visnovsky, médiateur national du crédit aux entreprises, il n'y a pas d'alerte : « C'est conforme au plan de remboursement. La perte nette de l'État est de 3,5 milliards d'euros sur les 145 milliards distribués. En Hauts-de-France, nous sommes à 1 point de plus que la moyenne nationale mais globalement ce sont les mêmes ordres de grandeur ».

Sur les 680 000 entreprises françaises qui ont souscrit un PGE, 11 000 dossiers de restructurations ont été traités. « On constate un nombre limité de restructurations et de défaillances sur les PGE. Le taux de perte est de moins de 3%» explique l'intéressé. Malgré tout, la Banque de France annonce une année 2024 «tendue et au ralenti » avec notamment une forte baisse des crédits d'investissement. «Dans notre prévision macroéconomique, on prévoit une baisse de la contribution de l'investissement en 2024 de -0,6%». 2025 devrait connaître pour sa part une reprise «plus prononcée».

Mettre l'accent sur la prévention des entreprises

Mais malgré le nombre limité de restructurations, force est de constater que les entreprises n'anticipent parfois pas assez les difficultés : « Nous avons un arsenal de dispositifs d'aides, mais on s'aperçoit que les entreprises ne les saisissent pas, ou trop tard. Par exemple les procédures collectives. Il y a un vrai sujet de sensibilisation autour de ces dispositifs. Cela va de la détection en passant par la médiation du crédit jusqu'aux procédures préventives », témoigne Frédéric Visnovsky.

À l'échelle nationale, ce dispositif reste peu utilisé au regard des éventuels problèmes rencontrés par les entreprises alors que les procédures préventives s'avèrent efficaces : « Dans plus de 60% des cas, elles débouchent sur des traitements appropriés, autrement dit évitent les faillites », insiste le médiateur national du crédit aux entreprises.

Cap sur les 13 régions

Frédéric Visnovsky et les équipes de médiation ont démarré l'année 2024 sur les chapeaux de roue. « La mission que l'on va conduire cette année, c'est d'aller dans les 13 régions françaises pour mobiliser les acteurs (CCI, Medef, BGE, CMA) mais surtout les entreprises pour leur apporter des solutions. Plus elles vont se saisir tôt des dispositifs, plus les chances de succès existent. C'est maintenant qu'il faut les saisir avant de se retrouver dos au mur. Le plus dur est de toucher les très petites entreprises ».

Les différents dispositifs d'accompagnement

La Banque de France propose tout un panel de dispositifs d'accompagnement pour les entreprises, toutes tailles et secteurs d'activité confondus. L'institution bancaire accompagne les entrepreneurs tout au long du cycle de vie de leur organisation. En Hauts-de-France, 726 dossiers correspondant TPME ont été pris en charge en 2023, dont 353 dans le Nord, 184 dans l’Oise, 113 dans le Pas-De-Calais, 53 dans la Somme et 23 dans l’Aine. On note une forte progression de l’activité en région soit 26.9% supplémentaires en 2023 par rapport au demandes traitées en 2022 (572 dossiers).

Parmi les dispositifs, on retrouve l’offre OPALE, opérationnelle depuis 2 ans. « C'est un diagnostic financier synthétique gratuit et en ligne ». La condition pour pouvoir en bénéficier : afficher un CA minimum de 750 000€ et présenter 2 exercices comptables. L'objectif : mesurer un certain nombre d'indicateurs, identifier ses points forts, ses points faibles, ses marges de progression et ainsi pouvoir se comparer aux concurrents.

La Banque de France a également mis en place un dispositif à destination des start-up, testé depuis septembre 2017. Objectif ? Les orienter, être référent pour la cotation de ces sociétés, mais aussi développer un réseau de soutien dans les capitales French Tech : « Nous sommes présents à la French Tech de Lille. Nous tenons tous les mois des permanences afin d’accompagner les start-ups. Elles peuvent d'ailleurs prendre rendez-vous sur le site lafrenchtechlille.com ». 173 start-ups ont été suivies dans le cadre de la cotation qui leur est adaptée.

Enfin, la Mission EDUCFI (éducation économique budgétaire et financière). La Banque de France a été désignée par les pouvoirs publics opérateur national, responsable de la mise en œuvre de la stratégie. À ce titre, elle coordonne les actions des acteurs institutionnels, associatifs et professionnels. En région, ce sont 241 personnes des publics relais qui ont pu bénéficier d’actions EDUCFI.