100 000 emplois à pourvoir par an d’ici à 2025 dans l’industrie

Léonce-Michel Deprez et Patrice Pennel
Léonce-Michel Deprez et Patrice Pennel

Léonce-Michel Deprez et Patrice Pennel

Léonce-Michel Deprez, président du Groupe des fédérations industrielles (GFI) dans les Hauts-de-France, et son homologue de l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM), Patrice Pennel, étaient présents le 26 avril à Marcq-en-Barœul (Nord), sur le campus Entreprises et Cités, afin de présenter la Fabrique de l’avenir. Cette démarche collective inédite, née début avril, est portée par les fédérations industrielles françaises.

Picardie la Gazette : Comment est née cette initiative ?

Léonce-Michel Deprez : Elle est née d’un constat. L’industrie a toujours été le parent pauvre de l’économie française, et cela le reste quand on a entendu les propositions des différents candidats à l’élection présidentielle. Beaucoup de thèmes ont été développés, mais je ne pense pas avoir entendu une seule fois le mot “industrie”. C’est dommage, car nous vivons dans une région fortement industrialisée. En chiffres, nous sommes à 267 000 salariés, c’est-à-dire 10% des salariés de l’industrie nationale, et ce sont 11 000 établissements inscrits au registre du commerce sous la norme industrie. Nous sommes représentés dans toutes les branches de ce secteur. À travers cette Fabrique de l’avenir, il s’agit notamment de mettre en avant le renouveau de cette filière et ses nombreux débouchés en termes d’emploi, ou encore sensibiliser les pouvoirs publics sur la nécessité de redorer auprès des diffé- rents organismes de formation l’image d’un secteur qui souffre encore de clichés vieillissants.

P.L.G. : Quel est l’objectif de cette Fabrique de l’avenir ?

L.-M. D. : Nous souhaitons dire et démontrer que l’industrie va mieux, même si nous sommes toujours confrontés aux difficultés. Mais il existe un indicateur très symbolique : en France, en 2016, le solde entre disparitions et créations d’usines a été positif. Pour la première fois depuis au moins quinze ans, au niveau national, nous avons vu plus d’industries se créer que disparaître. On parle de 100 000 emplois à pourvoir chaque année d’ici à 2025 dans l’industrie. Dans les Hauts-de-France, ça correspond à 15 000 emplois. Ce secteur va à nouveau embaucher de façon très massive. Mais on constate surtout que nous sommes, de façon permanente, en tension en matière d’embauches à tout niveau : dans la métallurgie, dans la chimie, etc. Pourquoi ? Car l’orientation des jeunes n’est pas suffisamment bien faite, alors que nous avons des emplois à proposer à la sortie des contrats d’apprentissage, aussi bien dans les branches industrielles que dans ses branches transversales. C’est un réel problème.

P.L.G.  : Comment remédier à ce déficit d’image ?

L.-M. D. : À travers cette campagne de promotion, le but est de mettre en place une politique de la formation pour les emplois industriels. Nos outils de formation doivent être plus attractifs et en phase avec les nouvelles technologies, nous devons révolutionner notre pédagogie. Faire en sorte aussi que les centres de formation soient à proximité des bassins d’emploi et répondent aux nouveaux besoins. Nous avons quitté l’imagerie populaire de l’industrie du XIXe siècle. Les usines n’ont plus rien à voir avec celles d’hier. L’industrie du futur se numé- rise, les processus de fabrication changent, les produits fabriqués intègrent de plus en plus de valeur ajoutée… Tant qu’on n’améliorera pas l’image, on ne pourra pas attirer davantage les jeunes, d’où cette Fabrique de l’avenir.

P.L.G. : Concrètement, comment se matérialise-t-elle ?

Patrice Pennel : D’abord par une campagne de communication dans la presse régionale sur des thèmes communs à toutes les branches industrielles. Au mois de mai, ce sera le thème de l’innovation qui sera suivi par d’autres thèmes : emploi en juin et formation en octobre. Notre budget s’étale autour de 10 millions d’euros consacrés à toutes les thématiques de l’industrie, et ce, en attendant d’autres thèmes pour l’année 2018. Il faut reconquérir le cœur de nos jeunes et les faire venir dans nos centres de formation ou, en sortant des écoles, les faire venir dans l’industrie. Notre faillite, ces vingt dernières années, c’est un problème d’abord humain. Dans le cadre de cette Fabrique de l’avenir, les différentes branches industrielles vont travailler ensemble, car elles ont bien compris qu’elles représentaient un enjeu majeur pour la France. D’ailleurs, une démarche collective a été lancée avec la publication d’un manifeste signé par l’ensemble des fédérations de l’industrie, porté à la connaissance des candidats à l’élection présidentielle.

P.L.G. : Il existait un réel besoin de communiquer…

L.-M. D. : Effectivement ! Dans les prochaines années, c’est l’industrie qui va certainement embaucher le plus, car le tertiaire va connaître une révolution numé- rique considérable qui va transformer ses métiers. Selon moi, cela n’ira pas en faveur de l’emploi. Il faut préparer les esprits à ça. Enfin, l’emploi industriel est mieux rémunéré, plus protégé et plus valorisant dans la mesure où il débouche sur des métiers de plus en plus sophistiqués et branchés.