À Paillart, Delphine Mahieus, productrice de foie gras, s’interroge sur l’avenir

La ferme du Val-de-Noye, à Paillart, près de Breteuil, produit du foie gras qui représente un quart environ de son chiffre d’affaires. Avec les derniers questionnements sur ce produit typiquement français et le manque de main d’œuvre, l’avenir pose question.

Vente sur l’exploitation, à la boutique et dans un distributeur automatique, sur des marchés, en amap… l’agricultrice multiplie les lieux de vente et le temps sur la route.  (c)  Ferme du Val-de-Noye
Vente sur l’exploitation, à la boutique et dans un distributeur automatique, sur des marchés, en amap… l’agricultrice multiplie les lieux de vente et le temps sur la route. (c) Ferme du Val-de-Noye

Delphine Mahieus est une agricultrice passionnée, la quatrième génération à la tête de la Ferme du Val-de-Noye, à Paillard. L’exploitation, en polyculture et élevage de volailles, vend une bonne partie de ses produits transformés dans sa boutique. Pour autant, Delphine Mahieus s’interroge sur l’avenir de l’un de ses débouchés, la production de foie gras.

25 % du chiffre d’affaires lié au foie gras

« Nous exploitons 130 hectares et élevons 4 000 volailles. L’élevage représente environ 50% de notre chiffre d’affaires, dont la moitié est liée au foie gras, explique la quarantenaire qui travaille avec son mari. C’est ma maman qui a lancé cette production dans les années 90. » Aujourd’hui, une clientèle fidèle s’est formée. « Il y a un lien particulier, certaines personnes m’ont connu enfant », sourit-elle. Un attachement qui s’est exprimé par un élan de solidarité quand un incendie a ravagé le laboratoire, la salle d’abattage et de découpe et l’espace de vente, en 2018. « Cela a été un mal pour un bien, nous avons pu reconstruire en prenant en compte de nouvelles normes et ainsi transformer des produits supplémentaires ».

Depuis, l'élevage et la productions ont repris. « Le travail se situe principalement de septembre à Noël, avec un lot de 800 canards, avec un complément de 250 animaux au printemps », explique Delphine Mahieus qui élève par ailleurs des poulets, des poulardes, des chapons, des pintades et des oies. Des volatiles qui arrivent généralement entre un jour et six semaines, selon les espèces, et qui sont nourris avec les céréales produites sur place.

Ce sont sur ces deux pics de travail lié au foie gras que l’exploitante a besoin d’une main d’œuvre complémentaire qui était assurée, jusqu’à présent, par sa famille. Mais l’agricultrice doit désormais recruter un salarié, ce qui s’avère compliqué. « C’est un mi-temps dont les périodes de travail sont irrégulières. De plus, les gens ont un apriori sur le travail d’abattage », constate-t-elle.

Des incertitudes

Ce recrutement s’avère pourtant essentiel. « Si je compare mon travail à celui que faisait ma mère, je passe beaucoup plus de temps sur l’élevage, je transforme plus alors que ma mère vendait beaucoup de volailles entières ». Saucisses, brochettes, boudins, cordon bleu… les consommateurs ont des demandes plus variées. Il est également nécessaire de multiplier les lieux de vente : le magasin, les marchés, les Amap, ce qui augmente le temps de transport.

Mais l’agricultrice s’interroge également sur les contraintes qui pourraient peser à l’avenir. « Les normes sont de plus en plus fortes, les investissements de plus en plus élevés, s’inquiète-t-elle. Il ne reste que quatre producteurs de foie gras dans l’Oise, dont deux devraient arrêter prochainement ». À cela, s’ajoute une société plus critique vis-à-vis de la pratique du gavage. « Pour le foie gras, j’ai une large clientèle, mais vieillissante. Parfois, une personne m’achète une volaille mais me dit qu’elle ne me prendra jamais ce type de produit. Dans ce cas, j’explique comment nous travaillons, que nos canards sont en liberté, c’est loin des clichés qui circulent », conclut l’agricultrice.