Logement

Alerte sur l'immobilier neuf

L'immobilier neuf de construction affiche de très mauvais chiffres, avec 25% de baisse de son activité en 2020. Des résultats dus à la pandémie, mais aussi, à une crise de l'offre structurelle, alerte la FPI, la Fédération des promoteurs immobiliers.

(c)Adobestock
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Les chiffres sont « mauvais », déclare Alexandra François-Cuxac, Présidente de la FPI France, Fédération des promoteurs immobiliers du secteur privé. Celle-ci rassemble 640 sociétés de promotion, pour un chiffre d'affaires de 43,1 milliards d’euros. Le 4 mars, lors d'une conférence de presse en ligne, la FPI présentait les chiffres de l'immobilier neuf, une analyse du dernier trimestre 2020 et le bilan de l'année écoulée.

Tout d'abord, rappelle Alexis Rouque, délégué général de la FPI, l'évolution des logements neufs s'inscrit dans le cadre d'une baisse du PIB de 8,3% dans l'année. Et dans le bâtiment, l'ensemble des acteurs affichent des baisses considérables de leur activité. La FFB, Fédération française du bâtiment, a annoncé une chute de 15%, la CAPEB, syndicat patronal de l’artisanat du bâtiment, de 9%. Dans l'immobilier neuf, c'est pire : la FPI présente une baisse de 25% de son activité en volume. En cause, « le contexte est morose », résume Alexis Rouque. En effet, pour lui, « les indicateurs économiques sont d'une grande volatilité », qu'il s'agisse du pouvoir d'achat ou de l'épargne, qui varient au rythme des contraintes liées à la pandémie. Seuls points positifs, la faiblesse des taux d'intérêt, qui rend le crédit accessible aux acheteurs, et l'indicateur Insee de la confiance des ménages. Celui-ci montre une « forme de résilience » des Français qui se projettent dans l'avenir, en dépit des incertitudes, constate Alexis Rouque.

Cet indicateur reste supérieur aux taux atteints en 2015 et 2019. À ce titre, il constitue une « lueur d'espoir », estime Alexis Rouque. Car pour le reste, l'ensemble des indicateurs du marché suivent une dynamique inquiétante. Ainsi, en 2020, le nombre de permis de construire a diminué de 14,7%. La chute est particulièrement brutale pour les logements collectifs, pour lesquels ils ont diminué de 20,7% pour atteindre 181 200. « Nous avons perdu un logement sur cinq en collectif, principalement dans les métropoles », résume Alexis Rouque. Les mises en chantier, elles, ont baissé de manière moins importante : -9,1% dans le collectif (194 100). « Cela concerne des permis déjà attribués. Et si la baisse des mises en chantier reste presque raisonnable, celle du nombre de permis annonce une baisse des mises en chantier en 2021 et 2022 », décrypte-t-il. Il sera difficile, pour les maîtres d'ouvrage, de bâtir une offre dynamique.

Tous les indicateurs à la baisse

Au total, « dans le résidentiel, le secteur de l'immobilier neuf fait face à une crise de l'offre, et non de la demande », résume Alexis Rouque. Avec 381 600 permis de construire attribués en 2020, après le pic de 500 000 en 2017, la chute est de 120 000 en trois ans. « Cette dévalorisation avait commencé avant la pandémie. Celle-ci a accentué la baisse qui date d'avant les élections municipales, après lesquelles nous avons eu du mal à rebondir », précise-t-il. Autre donnée inquiétante, le repli des réservations de logements. Au quatrième trimestre 2020, elles ont diminué de 14,1% (43 105). Et sur l'année entière, la baisse atteint 23,3%. Les confinements en sont largement à l'origine, d'après la FPI. Les promoteurs ont eu beau essayer de digitaliser leur offre, l'immobilier, « ce n'est pas du clic and collect », commente Marc Villand, vice-président de la FPI.

Au total, en 2020, les promoteurs ont donc vendu 128 031 logements, soit près de 40 000 de moins qu'en 2019. Tous les segments n'ont pas été également impactés. La catégorie des réservations au détail a littéralement dégringolé (-31,3% au quatrième trimestre 2020), atteignant 23 186 réservations. Parmi elles, la proportion demeure stable et équilibrée entre investisseurs physiques (51%) et propriétaires occupants ( 49%), tous deux également touchés par la crise. La catégorie de la réservation en bloc, elle, a augmenté de 7%, poursuivant la tendance de l'année précédente. Cette évolution a partiellement amorti la forte baisse des ventes au détail. Autre tendance négative encore enregistrée par la FPI, la chute de 33,2% de mises en vente de logements ( 79 373), en 2020. Il s'agit de l'un des chiffres les plus bas atteints depuis 20 ans.

Une offre de plus en plus restreinte

« On pressent un problème de production », alerte Marc Villand. Dans le même sens, l'offre commerciale aussi diminue (-14%), notamment en raison des chantiers qui ont subi des retards liés à la pandémie. Elle est passée sous le seuil des 90 000 lots à la vente. Quant aux prix, ils ont connu des « mouvements importants » les trois derniers mois de 2020. Ils ont augmenté en régions, et diminué globalement en France. Le phénomène résulte de la baisse en Île-de-France, où les prix, hauts, sont en phase de rééquilibrage et où le marché se déplace du centre vers la première couronne, de la première, vers la deuxième...

Alexandra François-Cuxac estime que « la crise est structurelle. Elle a pris naissance bien avant la crise sanitaire. On constatait déjà des signes inquiétants sur la production du logement (..). Le sujet de l'offre est préoccupant », pour l'ensemble de la filière. Pire, d'après elle, la crise est « durable ». Pour la FPI, l'ensemble des signaux indiquent une aggravation de la situation dans les mois à venir. « Nous n'avons pas trouvé les moyens dans le pays de débloquer les verrous qui empêchent la production de logements neufs de se dérouler pour atteindre des volumes compatibles avec les besoins de logements des Français », analyse la présidente de la Fédération. Elle invite à « renouer avec un discours volontariste, positif sur la construction de logements et travailler à un modèle de logement qualitatif durable et abordable ».


Bureaux neufs : incertitudes sur la demande


Pour Marc Villand, vice-président de la FPI, « il existe une situation très contrastée entre l'immobilier résidentiel et d'entreprise ». Dans ce secteur, la production baisse, mais la commercialisation encore plus, d’où une augmentation de l'offre. Et d'immenses interrogations pèsent sur la demande, à l'heure où les entreprises se convertissent, bon gré malgré au télétravail.