L'énergie, un sujet brûlant au Congrès des maires de l'Oise

L'Union des maires de l'Oise (UMO), présidée par Alain Vasselle, a organisé son traditionnel congrès, le 8 octobre à la salle des fêtes de Bresles, et la crise énergétique a été au cœur des débats. Entre la flambée des prix, l'épargne des collectivités déjà mise à mal depuis la crise de la Covid-19 et la loi des Finances 2023 attendue, le temps de la sobriété énergétique et des actions concrètes est arrivé... pour entrer pleinement dans la transition écologique.

Le congrès des maires de l'Oise a rassemblé près de 400 personnes. (c)DR
Le congrès des maires de l'Oise a rassemblé près de 400 personnes. (c)DR

Si un doute planait encore sur la crise climatique... la crise de l'énergie, un hiver 2021 plus froid et le temps caniculaire de cet été ont prouvé qu'il n'y en avait plus. Et les collectivités sont au pied du mur : si le MW/h d'électricité coûtait 52 euros en janvier 2021, il était affiché en août 2022 à 1 130 euros. Le gaz affiche lui aussi une multiplication par dix des prix, passant de 16 euros le MW/h à 300 euros, durant la même période. Cette flambée des prix a été accélérée, en 2022, d'abord par l'invasion de l'Ukraine par la Russie et sa suspension de livraison de gaz et puis par la canicule de cet été engendrant une pression supplémentaire sur les marchés de l'énergie et un arrêt pour maintenance de 27 réacteurs nucléaires sur 56. L'avenir, quant à lui, reste incertain... avec, en plus, une année 2021 durant laquelle les communes de l'Oise ont moins épargné.

Dans la salle des Congrès des maires de l'Oise, devant ce contexte fait par le Syndicat de l'énergie de l'Oise, les maires présents n'ont pas réagi... mais la colère était mesurable. Se rajoute à ce contexte, la préparation de la Loi des finances 2023 dans laquelle est prévue la suppression de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises), de la taxe d'habitation et des DGF (dotations globales de fonctionnement). « Il y a un mécontentement généralisé des maires de France. On ne peut plus s'adapter alors que des actions ont été lancées il y a quelques années. Entre la crise de l'énergie et la Loi des finances 2023, si on s'adapte encore, on va remettre en question les actions publiques », intervient un élu.

Des collectivités, en colère

De son côté, Nadège Lefebvre, présidente du Département de l'Oise, interpelle le Gouvernement à prendre en compte les difficultés des collectivités locales en évoquant la centralisation de l’État et « une confiance abîmée », le sollicite afin d'être davantage « un État partenaire » plutôt que de « traiter les collectivités comme des sous-traitants » tout en revendiquant « une nouvelle dynamique, un acte 3 de la décentralisation ».

Présente lors de Congrès des maires de l'Oise, Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales a annoncé des mesures et a souhaité rassurer les maires, restés peu convaincus tant le contexte reste tendu. « Le projet est de faire des élus, les acteurs de leur politique, et d'instaurer une nouvelle méthode de travail, explique-t-elle. Nous avons déjà mis en place des mesures de soutien. Les collectivités qui ont besoin de fonds pour développer leur projet peuvent appeler la DGFIP jusqu'au 15 novembre, car le gouvernement a débloqué une aide de 430 millions d'euros de fonds d'aide aux collectivités et déjà 406 communes de l'Oise semble être récipiendaires à cette enveloppe et cela concerne 100 syndicats et 18 EPCI. » Caroline Cayeux a également annoncé « une décentralisation avec des démarches plus faciles des subventions », et une compensation intégrale de la CVAE. Mais aussi une augmentation de l’enveloppe de la sécurisation des dépenses des collectivités, de 320 millions d'euros, concernant la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et de la dotation de solidarité rurale (DSR). « 95% des communes connaissent une augmentation ou un maintien des dotations », a présenté la ministre. Dans la salle, c'est bien le mot « maintien » qui a fait bondir des chaises.

Enfin, la ministre a insisté sur deux dispositifs phares du Gouvernement, Action Cœur de Ville et Petites villes de demain, favorisant le développement des action de fonctionnement. Dans l'Oise, 60 millions d'euros cumulés ont été accordés pour quatre villes. « Et en ce moment, nous co-construisons un projet pour lutter contre la désertification médicale en ruralité », annonce-t-elle.

Une politique environnementale de l’État trop tardive ?

Alors, le contexte de la crise de l'énergie pousse les communes à impulser une nouvelle façon de consommer, une mise aux normes les bâtiments publics et une mise en place de solutions d'énergies renouvelables. Et le chantier est important : dans l'Oise, sur 1 300 bâtiments publics diagnostiqués, le SE60 enregistre 80% de bâtiments mal isolés, 40% sans régulation centralisée du chauffage, 90% avec des sources d'éclairage énergivores, 60% avec un niveau d'isolation faible des murs, 55% avec des radiateurs sans régulation terminale et 40% des bâtiments chauffés à l'électricité. L'étude démontre dans le même temps que les bâtiments publics représentent 70% des dépenses énergétique d'une commune. « Il faut comprendre qu'on ne reviendra pas dans le monde d'avant », note Éric Guérin., le président du SE60.

Cependant, des communes ont déjà entamé la transition écologique. À l'instar du maire de Clermont. Lionel Ollivier. En juin dernier, l'élu a intégré le dispositif Intracting de la Banque des Territoires. Grâce à un prêt bancaire attractif, 14 bâtiments communaux ont été étudiés et des travaux ont été entrepris. La rénovation énergétique de la salle Pommery gagnera 44% de la consommation énergétique. « Grâce à la baisse de consommation nous participons à la transition écologique et ce gain rembourse le prêt. Il faut une stratégie pluriannuelle pour une démarche vertueuse », explique-t-il. Et puis d'autres actions fortes émergent comme la mise en place de méthaniseurs un peu partout dans le département prônant une énergie produite et utilisée localement. Le dernier exemple à Sempigny illustre encore cette démarche. La commune a connu un test réussi avec succès de la première injection de méthane de synthèse dans le réseau de gaz GRDF, pour la première fois en France. À Beauvais, la Ville va développer le photovoltaïque.

Des actions comme celles-ci émergent dans la département mais les maires attendent davantage du gouvernement. « Nous sommes tous en accord avec ce que nous vivons, exprime dans la salle le maire de Laigneville, Christophe Dietrich. Mais il y a une incohérence du gouvernement et des mesures et un décalage entre les instruction nationales et le terrain. » Même constat pour un élu de Bonneuil-les-Eaux : « Nous avons un projet de chaudière en biomasse. Dans l'Oise il y a un potentiel fort d'énergie, nous avons la matière première mais nous avons besoin d’ingénierie, surtout dans les petits villages. Et nous ne l'avons pas. » Ce problème de manque de dynamisme de la politique environnementale française est partagé par le maire de Bussy, Pascal Dollé qui a interpellé la préfète de l'Oise. « Une contractualisation locale serait-elle pas possible ? Ou expérimenter des contrats locaux ? Il faut lever les freins ! »

En attendant...

Les communes doivent donc prendre leur destin en main en attendant une prochaine réponse du gouvernement. Le SE60 prône des petites actions engendrant de grandes conséquences. Du côté de la sobriété énergétique, pour les bâtiments publics, la baisse de la consigne d'un degrés permettrait une économie d'énergie potentielle de 10%, la coupure des éclairages publics la nuit, 40%, et la rénovation des luminaires énergivores, 50%.

Du côté des actions d'efficacité énergétique, les travaux de rénovation énergétique, permettraient quant à eux une économie de plus de 50%, le changement des équipements vétustes, 15%, ou encore la mise en place de régulation centralisée, 10%. « L'inaction coûtera plus cher que l'action », ne cesse de répéter le président du SE60. À Abbecourt, la rénovation du parc d'éclairage public permet un gain de 48% de la consommation énergétique.

Dans cet imbroglio gouvernemental, les maires attendent donc des réponses fortes, des aides et une décentralisation. À l'heure de la Loi des finances 2023, d'une crise climatique et énergétique, la tension monte chez les maires.

Le Congrès, en photos

(de g. à dr.) Stanislas Barthélémy, trésorier, Alain Vasselle, président, François Deshayes, secrétaire adjoint et Dominique Cordier, maire de Bresles. (c)DR
Les politiques locaux, régionaux, députés et sénateurs de l'Oise ont répondu aux questions des maires.(c)DR
Les élus étaient présents. (c)DR
Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales, est venue assister au congrès. (c)
Joël Balandraud Fontaine, secrétaire général de l'Association des maires de France (AMF). (c)DR
Eric Guérin (2e en partant de la g.), président du SE60 a présenté un rapport sur l'énergie, aux côté de Lionel Ollivier, maire de Clermont, Alain Vasselle et Clément Bousquet, consultant Secteur Public/Finances Locales. (c)DR
Un salon de partenaires était aussi organisé. (c)DR
Le congrès des maires de l'Oise a rassemblé près de 400 personnes. (c)DR