Covid-19 : l’impression 3D fait ses preuves

La pénurie d’équipements médicaux dans l’actuelle crise du virus Covid-19 conduit à se tourner vers l’impression 3D. Son utilisation dans les centres hospitaliers a été largement médiatisée. Elle peut intéresser de plus en plus de PME cherchant à renouveler ou compléter leur parc de machines-outils.

Covid-19 : l’impression 3D fait ses preuves

L’impression 3D, appelée également « fabrication additive » (additive manufacturing) continue de gagner du terrain. Du prototypage, on est passé à la fabrication de pièces en “dur” et en série. Pour rappel, cela consiste à fabriquer des objets à partir de buses ou “extrudeurs” déposant, couche par couche, des résines ou des polymères (plastiques) ou des alliages métalliques, voire de la silice (verre), à partir de poudres, granulés, filaments/ rubans ou matières semi-liquides portées à l’état de fusion ou transformées par rayon laser ou faisceau d’électrons. La machine est pilotée par un logiciel 3D où l’objet a été préalablement dessiné en relief, avec une très grande précision. 

La crise du Covid-19 a suscité une pénurie criante de certains équipements dans le secteur hospitalier. Qu’il s’agisse d’objets de protection contre la contagion – lunettes, masques ou visières, etc. – ou d’équipements de soins intensifs, comme les appareils respiratoires, leur fabrication en impression 3D est devenue très utile.

Au plus près des malades

Ainsi, l’hôpital Cochin à Paris (AP-HP), suivi de l’hôpital Necker, a accepté la proposition de praticiens chercheurs et d’universitaires, soutenu par un mécène (le groupe Kering, avec plusieurs centaines de milliers d’euros) : ils ont fait appel à des spécialistes d’impression 3D pour la fabrication de tels équipements en un temps record. En moins de trois jours, au cœur de l’ancienne abbaye de Port-Royal (Paris 14e), 60 machines ont été installées par la start-up française Bone3D, spécialiste d’équipements chirurgicaux sur mesure. « Nous allons parvenir à une capacité de 3 000 pièces par jour », nous a affirmé Jeremy Adam, fondateur de cette jeune pousse. Il s’agit de valves et de pièces d’intubation pour appareils respiratoires, de montants de lunettes ou de masques rigides de protection faciale ou encore des poignées de portes pouvant s’ouvrir avec les coudes, etc. 

Des initiatives dans tout le pays
 « À part les surblouses et les masques filtrants en tissu, l’impression 3D peut fabriquer les trois quarts des fournitures et équipements utiles en milieu hospitalier », estime Jeremy Adam.

À partir d’une liste disponible sur la plateforme “3dcovid.org”, diverses initiatives fleurissent à travers toute la France. À Roubaix, la start-up Dagoma a mobilisé son parc de 300 imprimantes 3D pour produire des visières de protection. À Toulouse, le CNES (Centre national des études spatiales) conçoit et fabrique des raccords permettant d’intuber deux patients simultanément. 

À Nantes, le CHU s’est rapproché de designers 3D du réseau “Makers for Life”. À Pantin (93), le Club Sandwich Studio s’est engagé dans un projet MUR (« minimal universal respirator »), en test à l’hôpital Henri Mondor, à Créteil, ou encore un groupe de ‘geeks’ de Brunoy (91), intervenant auprès du CH de Corbeil-Essonne. En Bretagne, près de Saint-Brieuc, la commune de Hillion soutient l’initiative d’une dizaine de bénévoles qui, avec l’aide d’un expert en imagerie médicale, fabriquent des visières de protection. Quasiment tous ces collectifs échangent leurs applications 3D en Open Source. Le CHU de Caen coopère avec Decathlon et l’accélérateur ‘hardware’ de Paris Saclay et d’autres acteurs pour fabriquer plus de 10 000 équipements de protection en impression 3D, avec des matériels mis à disposition par le constructeur HP (Hewlett-Packard).


Et des industriels contraints de suspendre leur activité ont décidé de s’y mettre. Ainsi à Amiens, la société Systeo Protection, conceptrice de systèmes d’alarme, a investi 2 000 euros dans des imprimantes 3D pour produire 500 visières de protection, dont le coût n’excède pas 3 euros. A plus grande échelle, un consortium réunissant Air Liquide, Valeo, Schneider Electric et PSA prévoit de fabriquer, en impression 3D, une centaine d’appareils respiratoires par jour.

Au bilan, ce recensement, non exhaustif, résume bien le potentiel prometteur de l’impression 3D.

Pierre MANGIN