Les chaussures de sport cherchent la voie durable

Made in France, économie circulaire... Patrimoniaux ou nouveaux venus, des entrepreneurs spécialisés dans les chaussures de sport et loisirs s'efforcent de trouver de nouvelles voies pour rendre plus durables ces produits traditionnellement fabriqués en Asie.

Les chaussures de sport cherchent la voie durable

Une table ronde consacrée à la « Production et sourcings responsables dans les marchés du sport et des loisirs », s'est tenue dans le cadre de la troisième édition du forum dédié à la « RSE dans les métiers du cuir, du luxe et de la mode », à Paris. Elle était organisée par le Conseil national du Cuir, organisation interprofessionnelle de producteurs et utilisateurs de cuir. Ce jour-là, quatre spécialistes de la chaussure de sport et de loisirs, de taille et d'ancienneté très diverses, ont témoigné de leurs tentatives pour rendre leur démarche plus responsable. Via, notamment, la clé du MIF (Made in France), dans ce secteur où l'essentiel de la production est située en Asie, et celles de l'éco-conception et de l'économie circulaire.

Le pari d'Insoft, fondé en 2012, et qui fabrique aujourd'hui près de 10 000 paires de chaussures, consiste précisément à concilier toutes ces dimensions. Pour Patrick Mainguené, son fondateur , « l'innovation est la clé pour produire un produit différenciant, tout en associant la mode et l'économie circulaire pour réaliser un produit attractif et confortable (…). Il faut tirer un trait sur certains réflexes du design, comme le fait d’associer des matériaux très différents qui ne permettent pas de le recyclage ». Ainsi, après une carrière dans le secteur, ce fils de maître-bottier a conçu une chaussure tricotée à partir d’un fil issu du recyclage de bouteilles plastiques (Ector).

Dans le même sens, d'autres entreprises plus anciennes se sont lancées dans la recherche de nouveaux matériaux ou modes de production. Depuis cet été, TBS, filiale de l'entreprise historique Eram, produit des tongs fabriquées à partir... d'algues ! TBS a également gagné un Trophée de la mode circulaire avec un dispositif, Re-Source : il prévoit la récupération de chaussures, recyclables, ensuite réutilisées pour en fabriquer de nouvelles.

Dans le même sens, « au bout de neuf mois, nous envoyons un mail aux clients pour leur proposer de nous renvoyer les chaussures de running qu'ils ont achetées, s'ils le souhaitent », témoigne Marie-Laure Piednoir, responsable du développement durable chez Salomon, entreprise née en 1947 et pour qui les chaussures d'outdoor (trail, running) représentent 60% de l'activité. Une fois récupérées par la société, les chaussures de running sont recyclées en coques de chaussure de ski.

Difficile Made in France

Ces chaussures de Salomon qui font l'objet du dispositif de recyclage, sont produites en Asie. Mais début 2022, le groupe lancera sur le marché des produits Made in France : avec d'autres entreprises, Salomon a investi dans une usine automatisée de chaussures de sport, l'Advanced shoe factory 4.0, à Ardoix, en région Auvergne-Rhône-Alpes. Le projet, initié par le groupe Chamatex, spécialiste du textile, vise précisément à relancer une partie de la production de chaussures d’outdoor en France.

Une préoccupation partagée par de plus en plus d'entreprises du secteur. Chez TBS, déjà, le MIF représente 180 000 paires par an, soit 20% des ventes. « Cela tient à cœur de nos clients. Le MIF est l'une de nos forces », témoigne Pauline Ranger, cheffe de produit chaussure de la marque. Laquelle dispose de deux usines, auxquelles sont associées deux écoles de la chaussure, dans le Maine-et-Loire. Insoft, lui, est implanté à Romans-sur -Isère, berceau de la chaussure. Il y réalise la totalité de sa production. Quant au groupe familial Royer, fondé en 1945, il importe quelque 20 millions de paires de chaussures, par an ( Ellesse, Converse...).

Mais il s'efforce de favoriser un sourcing proche, en important des produits réalisés au Portugal, en Espagne et en Italie. Et il achète aussi des espadrilles dans le Sud-Ouest de la France. Toutefois, « on ne pourra pas tout fabriquer en France », prévient Mickaël Royer, vice-président du groupe. En cause : la perte de savoir-faire et le manque d'investissement dans les technologies, aujourd'hui plus matures en Asie, lieu d'approvisionnement encore incontournable.

Repère

En 2019, la France a importé 480 millions de paires de chaussures, selon les chiffres du Conseil national du Cuir.