Covid-19

Les jeunes entrepreneurs redoutent le mur de la dette

Ils demandent des subventions : le moral des jeunes entrepreneurs accompagnés par le réseau Initiative France est en baisse. Plus de la moitié d'entre eux disposent de moins de trois mois de trésorerie.

(c)Adobestock
(c)Adobestock

Ils ne lâchent pas l'affaire, mais leur moral chute et les inquiétudes se multiplient. Tels sont les principaux enseignements d'un sondage sur la situation des jeunes entrepreneurs dans la crise, présenté par le réseau d'accompagnement et de financement Initiative France, le 19 janvier, lors d'une conférence de presse, à Paris. L'étude a été réalisée en décembre dernier, auprès de 4 000 entrepreneurs suivis par le réseau et ayant créé leur entreprise depuis moins de cinq ans. Une première étude avait été réalisée à l'issue du premier confinement. Six mois plus tard, « c'est une tout autre ambiance. La première fois, leur message était ‘ touché mais pas coulé’. (…) Aujourd'hui, ce qu'ils nous disent est violent : ils veulent survivre, avant même de songer à rebondir », relate Guillaume Pepy, président d'Initiative France.

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Au centre Guillaume Pepy, entouré de deux jeunes entrepreneurs, dont Vanessa Delesderrier.(c)Anne Daubrée

D'après l'étude, 63% de ces entrepreneurs estiment que la crise a eu un impact grave ou assez grave sur leur chiffre d'affaires. Un quart d'entre eux jugent cet impact « faible ». Dans 8,6% seulement des cas, il a été positif. Les difficultés sont particulièrement aiguës pour les entrepreneurs situés dans les QPV, Quartiers prioritaires de la Politique de la ville : leur chiffre d'affaires a été négativement impacté dans 70% des cas. Ils subissent une « double peine », analyse Guillaume Pepy : ils ont été touchés par les fermetures administratives et par la baisse de revenus de leurs clients. Mais c'est l'ensemble de ces jeunes entrepreneurs qui sont angoissés. Leurs inquiétudes portent avant tout sur la perspective d'un troisième confinement ( 58,7%) une baisse durable de la consommation des Français (39,3%), et le remboursement des frais et des prêts (39,3 %). Ces entrepreneurs (dont les deux tiers se sont peu ou pas rémunérés), sont 46% à demander des subventions. « Le danger, c'est l'impasse financière (…). On entend de plus en plus dire, un peu sous le manteau, que 70% des PGE [prêts garantis par l’état] des petites entreprises ne pourront pas être remboursés », pointe Guillaume Pepy.

Continuer malgré tout ?

D'après l'étude, plus du quart des jeunes entrepreneurs « ne savent pas » s'ils seront en mesure de poursuivre leur activité en 2021. Pour Guillaume Pepy, « cette crise mine le business, mais aussi le moral. L'optimisme observé dans la première enquête est en forte baisse. Toutefois, il reste 46% des personnes qui restent optimistes », sur l'avenir de leur entreprise.

Des entrepreneurs accompagnés par Initiative France étaient présents pour témoigner de leur envie de continuer et de leur persévérance au cœur de la crise. Comme Vanessa Delesderrier, fondatrice de France Scellés, en 2016. À l'origine, elle commercialise des scellés, utilisés notamment par les transporteurs professionnels pour sécuriser leurs marchandises. Las, en mars 2020, la pandémie assèche le flux des échanges commerciaux, le chiffre d'affaires de la société chute de 70% : c'est le début d'une période mouvementée, au cours de laquelle l'entrepreneuse se débrouille pour lancer trois autres activités, saisissant des opportunités successives. La première : « fin mars, les scellés, c'était zéro ventes. Un fournisseur chinois m'a dit qu'il pouvait me procurer des masques, un client m'a dit qu'il en avait besoin. Je me suis lancée dans les produits Covid. Pendant deux mois, j'ai vendu des masques et du gel produit en Seine-et-Marne... ».

Au terme de plusieurs rebondissements, Vanessa Delesderrier commercialise à présent des produits personnalisés ( mug, porte-clés..). « Au bout de deux ans, je commence à fatiguer. Habituellement, on fait des projets sur douze à dix huit mois. Là, j'arrive le matin et je ne sais pas ce que je vais faire dans les semaines qui viennent », témoigne l'entrepreneuse, qui se rémunère 1 000 euros par mois et jongle avec une trésorerie qui fait des yo-yo (et un banquier compréhensif). En dépit de tout, la détermination de Vanessa Delesderrier ne faiblit pas.