Les maires de l’Oise pointent la nouvelle loi de finances

Olivier Dussopt assure ne pas abandonner les maires.
Olivier Dussopt assure ne pas abandonner les maires.

L’Union des maires de
l’Oise (UMO) s’est rassemblée à Bresle pour son traditionnel congrès, le 19
octobre. La réforme de la fonction publique, celle de la gestion des logements
insalubres et enfin la réforme de la taxe d’habitation ont été au centre des
débats. Face aux 500 maires présents, inquiets et perplexes, le ministre
Olivier Dussopt a tenté de rassurer l’assemblée et d’expliquer ces réformes
complexes, sans convaincre.

Arrivé dans la matinée, il est venu en personne rassurer les
maires des communes du département de l’Oise, lors du congrès de l’UMO. En
vain. Le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action des comptes publics,
Olivier Dussopt, s’est heurté aux irréductibles maires, en colère. C’est la
taxe d’habitation qui a fait le plus réagir et qui a été très largement
débattue. Depuis l’annonce du Gouvernement de sa suppression totale en 2023,
les maires montent aux créneaux. « On ne supprime pas un impôt local comme ça,
argue Alain Vassel, président de l’UMO, il faut davantage nous éclairer car cette
loi remet en question la gestion financière d’une commune dans son ensemble. »
Cette suppression devrait être actée en décembre, prévue dans la loi de
Finances 2020, et qui concernerait 75% des foyers du département dès l’année
prochaine. Cette loi ne concerne pas la taxe des résidences secondaires, qui,
quant à elle, reste en place. « Les maires ne sont pas contre une réforme de la
fiscalité mais il faut une vraie réforme, qui ne diminue pas les ressources »,
explique le maire de Montataire, Jean-Pierre Bosino.

Une mesure
centralisée ?

Pour certains, cette taxe est injuste voire inégale car
calculée avec un taux variable. Cependant, « de manière générale, les habitants
comprennent qu’il faille payer les investissements faits sur la commune », note
Coralie Quintin, consultante en fiscalité intervenue lors du congrès de l’UMO.
Selon elle, cette taxe ne serait pas celle qui dérangerait le plus les
contribuables. C’est bien ce point qui dérange et inquiète les maires, comme le
souligne Michel Arnould, maire de Verberie : « Les concitoyens n’auront aucune
conscience des coûts, remarque-t-il, je vais me retrouver avec des citoyens qui
me demanderont des moyens supplémentaires sans avoir aucune conscience des
coûts engendrés ». Cependant, pour les maires, ce n’est pas le manque de moyens
la question centrale, et le pire des scénarii, mais la perte définitive du
pouvoir local. « Cette loi est très complexe, mais cela est fait exprès, on
veut nous entraîner vers la suppression des communes avec la nationalisation de
la taxe d’habitation », targue le maire de Montataire, applaudi par toute
l’assemblée. Ce sentiment est partagé par l’ensemble des maires, à l’instar du
maire de Verberie, exaspéré au micro : « La pire des violences, c’est d’exercer
une fonction qu’on ne peut pas exercer. Au vu des discutions parlementaires,
mon sentiment est que cette loi ne sera pas à la hauteur ». Centralisation des
décisions, diminution du pouvoir, la perte de la proximité s’ajouterait à cette
liste. « Ce qui m’intéresse dans la vie locale, c’est le lien entre l’habitant
et sa collectivité. Quid de ce lien ? », s’inquiète Serge Lambert, conseiller
municipal de Clermont et ancien agent de la finance publique.

Olivier Dussopt face
aux maires

Très attentif aux remarques, le secrétaire d’État a tenté de
rassurer l’assemblée avec une mesure qu’il nomme « mesure de pouvoir d’achat »
avec un gain d’une moyenne de 750 euros par foyer. À travers une longue
explication, il a présenté la solution choisie par le Gouvernement pour pallier
cette suppression : la redistribution des impôts locaux. Ce système de
compensation financière laisse intégralement la taxe foncière aux communes et
transfère une part des recettes de la TVA aux départements tout en créant un
“coefficient correcteur” pour les communes sur ou sous compensées. «
La solution de dégrèvement n’a pas été retenue [ndlr : choix proposé par
l’Association des maires de France], car un dégrèvement pour un impôt qui
n’existe plus et que plus personne ne paie n’est pas intellectuellement possible
», se justifie Olivier Dussopt. Du côté des maires, la solution ne convainc
pas. « Une compensation n’est jamais pérenne dans le temps, développe
Jean-Pierre Bosino, elle est effective la première année, se transforme en
subvention puis disparaît. » La suite ? « Les maires devront s’adapter, comme
d’habitude, une lassitude grandit chez tout le monde, avec leurs décisions de
technocrates », glisse-t-on dans les couloirs. En attendant le vote de la loi
de Finances, les maires comptent faire entendre leur voix.

Du côté du sénat,
l’inquiétude des maires est fondée

Jérôme Bascher, sénateur (LR) de l’Oise et conseiller
départemental de l’Oise dans le canton de Senlis, dresse un bilan bondé
d’échecs des décisions prises par le Gouvernement ces dernières années. Pour
lui, la colère des maires concernant la suppression de la taxe d’habitation est
fondée car au-delà du manque de moyens, le sénateur pointe du doigt la
centralisation du pouvoir. « Les choix faits depuis la loi Notre, qui est un
échec, n’a de cesse d’attaquer les communes, les intercommunalités, les
départements, note-t-il. La suppression de la taxe d’habitation
déresponsabilise aussi les citoyens et à mon sens, c’est grave. La colère est
justifiée, les maires n’ont plus de pouvoir mais que des responsabilités. Et du
côté de la solution proposée, nous avions préconisé le dégrèvement, nous
verrons les conséquences du choix de ce système compensatoire, très complexe,
sur le long terme. »