Longueil-Sainte-Marie : Bic fabrique ses rasoirs depuis 50 ans dans l'Oise

Depuis 1973 à Longueil-Sainte-Marie, Bic fabrique trois millions d'exemplaires de son rasoir bien connu. Le groupe Bic, fabricant de stylos, rasoirs et briquets jetables, se dirige vers une politique environnementale, 50 ans après sa création.

Usine Bic à Longueil-Sainte-Marie ©Julien de Rosa/ AFP
Usine Bic à Longueil-Sainte-Marie ©Julien de Rosa/ AFP

On ne présente plus la marque Bic. Révolutionnaire dans les 1970, ce groupe a inventé le Bic1, la rasoir jetable qui a envahi presque toutes les salles de bains. L'une des usines du groupe est implantée dans l'Oise, à Longeuil-Sainte-Marie : si les ateliers de fabrication sont tournés vers les composants pour les briquets et l’écriture à sa création, c'est vers le rasoir que le groupe s'oriente très rapidement. Aujourd'hui, le rasoir blanc avec son manche orange est toujours sur le marché, fabriqué de A à Z dans cette usine où 200 salariés produisent quotidiennement 2,8 millions de pièces.

Et avec une production de 12 millions de pièces plastiques par jour, le groupe s'est posé la question sur son impact écologique. L'année 2024 sera donc un virage pour le groupe qui entend fabriquer des rasoirs un peu plus écologiques. Désormais, ils seront fabriqués à partir de polystyrène recyclé, en provenance de réfrigérateurs au rebut. Et pour l'avenir, le groupe Bic, numéro un mondial des briquets et numéro deux des stylos, s'est fixé comme objectif d'incorporer 20% de plastique recyclé dans l'ensemble de ses produits d'ici 2025, et 50% d'ici 2030. « Lacouleur ne sera pas la même, mais pour le consommateur, ça sera un produit qui restera satisfaisant », estime Sophie Legrand, directrice de l'usine Bic de Longueil-Sainte-Marie, évoquant les futurs rasoirs.

Actuellement, le procédé industriel des rasoirs est en phase d'essai, pour un démarrage de la production courant 2024. « Faire un rasoir sans aucun plastique, aujourd'hui, on n'a pas la solution », explique Sophie Legrand. Elle estime par ailleurs que le surcoût que représenterait un rasoir avec un manche en bois, alors que l'usine exporte 90% de sa production vers l'Europe, mais également « en Afrique, au Moyen-Orient, qui sont très sensibles au prix ».

Un investissement conséquent pour l'avenir

Cette annonce est un réel un virage pour l'entreprise. Et la fabrication d'un rasoir requiert de nombreuses compétences. Au total, 12  étapes successives sont nécessaires pour fabriquer les 7 à 8 millions de lames produites chaque jour, à partir des bobines de "feuillard", 50 kilos d'acier enroulé, qui vont donner environ 200 000 lames chacune.

Affutage, découpe, traitement chimique, avec dépôts de chrome pour améliorer la solidité de la lame, puis de téflon pour améliorer sa glisse, voilà toutes les étapes. Dans un bocal, les contrôleuses inspectent minutieusement toutes les lames, par lots de 1 200, enfilées en baïonnette, à l'affût de défauts qui les rendraient impropres à la commercialisation. « On investit beaucoup pour augmenter la productivité et intégrer de nouvelles technologies. Entre 2022 et 2024, on a environ quatre millions d'euros d'investissements sur l'usine », la directrice.

Des procédés industriels déjà présents

La matière recyclée, quant à elle, ne nécessite pas d'investissement, selon le groupe . Les machines sont les mêmes, seuls les procédés industriels sont à ajuster. « Toute la problématique, c'est avoir la quantité suffisante de matière recyclée disponible sur le marché, puisqu'il n'y a pas que Bic qui s'engage dans le développement durable, toutes les entreprises le font », assure la dirigeante, qui indique que le groupe est en pourparlers pour contractualiser avec un fournisseur, dont le nom reste pour le l'heure non communiqué.

Pour autant, les rasoirs restent jetables. « Ce ne sont pas des rasoirs à usage unique », rétorque Sophie Legrand car certains consommateurs peuvent « utiliser pendant plusieurs mois le même rasoir ». Elle souligne que le groupe, à côté des rasoirs monobloc, produit également des rasoirs rechargeables. Pour Charlotte Soulary, responsable du plaidoyer de Zero Waste France, cela « reste un produit à usage court » : « le rasoir jetable, ce n'est pas un produit qui a de sens d'un point de vue environnemental, même si on essaie de le modifier à la marge », juge-t-elle.

Un marché dynamique

Du côté pollution, la grande majorité des émissions de gaz à effet de serre de Bic sont indirectes, liées notamment à ses approvisionnements en matières premières dont le plastique. Selon le groupe, les émissions indirectes devraient baisser de 5% d'ici 2030, par rapport à 2019. Mais selon l'ONG, le prix d'achat devrait intégrer « le coût environnemental » du produit. Si la taxation évolue en ce sens, « ça aura des effets sur le marché, inévitablement », souligne Charlotte Soulary

Car pour l'heure, même en Europe, parmi les régions les plus ambitieuses en matière de développement durable, le rasoir jetable Bic cartonne, porté par le contexte inflationniste car connu également pour son prix abordable. « On est à + 20% en Europe en chiffre d'affaires, on gagne des parts de marché dans 19 pays sur 20, c'est souvent le cas dans un contexte économique difficile », indique Henri Nicolau, directeur général de Bic pour la France.

Source : l'AFP.