Quel service public se cache derrière le très haut débit ?

D’ici 2022, la totalité du territoire devrait être couverte en très haut débit, si les objectifs du plan “France très haut débit” sont remplis. Mais pour quoi faire ? Que devient alors le service public ? Débat entre la ministre de l’égalité des territoires et des représentants de collectivités locales.

Quel service public se cache derrière le très haut débit ?

Les enjeux des usages et des infrastructures se sont disputés la vedette, au cours de la table ronde “Egalité des territoires numériques : mutualisation des services”, qui s’est tenue le 19 février, à Paris, lors de la remise des labels de l’association Villes Internet. En toile de fond, le plan “France très haut débit”, lancé au printemps dernier. Il vise à couvrir intégralement le territoire en très haut débit, d’ici 2022. Sa stratégie implique les opérateurs, les collectivités territoriales et l’Etat, qui a notamment prévu 3 milliards d’euros de subventions pour contribuer à la couverture des zones non rentables pour les opérateurs. « Les premiers retours sont positifs. De nombreuses collectivités sont très mobilisées », constate Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement, lors du débat. De fait, les élus locaux sont tout à fait convaincus de l’importance du sujet, estime Vanik Berberian, président de l’Association des maires ruraux de France (AMRF). Un sondage de Ruralitic, association de maires ruraux investis dans ces sujets, confirme que les élus placent l’arrivée du très haut débit en tête de leurs préoccupations. Illustration de cette utilité, côté tourisme, « les gens qui réservent demandent s’il y a un accès à Internet avant les chemins de randonnées », explique Vanik Berberian, également maire de Gargilesse-Dampierre, une commune rurale de l’Indre. A Bras-sur-Meuse (700 habitants), un espace de coworking, lieu de travail collaboratif avec ressources partagées, regroupe pour l’instant sept entreprises. Or, « cette initiative dépend aussi de la qualité du débit », témoigne pour sa part Julien Didry, initiateur de ce projet, en tant que maire de la commune et représentant de l’Association des maires de France (AMF).

Le très haut débit pour quel service ?
Souci, le plan “France très haut débit” se concentre sur les infrastructures. Or, « si on veut aller de l’avant, il faut avancer en même temps sur les réseaux et sur les usages », estime Claudy Lebreton, président du conseil général des Côtes-d’Armor (PS) et de l’Assemblée des départements de France (ADF), auteur du rapport “Les territoires numériques de la France de demain”, remis à Cécile Duflot. Laquelle confirme que le très haut débit, « ce n’est pas seulement une question de tuyau, mais de ce qu’on en fait ». Pour elle, « cela permet de faire des économies, c’est une évidence. Mais cela permet aussi (…) d’avoir des usages renforcés, différents, qui remettent de la proximité ».
Dans les faits, le numérique peut servir de prétexte pour fermer des lieux physiques. Cécile Duflot, elle, évoque le dispositif des Maisons de service public qu’elle entend promouvoir. Concrètement, il s’agit d’une sorte de vidéo-guichet, augmenté de quelques services comme un scanner, et qui permet à un usager d’interagir à distance avec l’agent d’une administration qui n’est pas présente à cet endroit du territoire. Ces dispositifs pourraient être hébergés dans des lieux préexistants. Ainsi, « les bureaux de poste sont l’un des meilleurs réseaux, ils sont souvent en plein coeur des bourgs ou des villages. Il ne faut pas réinventer l’eau tiède. Nous sommes en pleine évolution, il y a quelque chose à inventer… », note Cécile Duflot. Autre piste, il existe 4 800 collèges sur le territoire. « Plutôt que de créer de nouvelles maisons pour les services publics, utilisons-les », suggère pour sa part Claudy Lebreton. Mais dans tous les cas, « à chaque fois qu’on veut faire évoluer les habitudes, il faut changer les mentalités, et ce n’est pas inconcevable qu’on rencontre des résistances », ajoutet- il. L’accompagnement, autre sujet essentiel…