Les Européens ne choisissent pas entre consommation et épargne

Optimistes mais prudents, les Européens comptent consommer davantage, mais ils sont aussi nombreux à vouloir continuer d'épargner, d'après l'Observatoire Cetelem.

(c)Adobestock
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Consommer et épargner à la fois... Le 27 janvier, lors d'une visioconférence, l'Observatoire Cetelem présentait son étude « Conso 2022 ». Celle-ci a été réalisée dans 17 pays, auprès de 15 800 Européens dont 3 000 Français, par Harris Interactive. Et ses conclusions semblent aller dans le sens des prévisions du FMI. Lequel prévoit une croissance du PIB de l'ordre de 7,4% en 2022, contre 8,5% en 2021, dans les pays concernés. Ainsi, constate l'étude, la perception que les Européens ont de leur pays s'est très nettement améliorée. Ils lui attribuent une note qui est passée de 4,7 à 5,4 sur 10, entre 2021 et 2022, un « niveau très élevé », commente Flavien Neuvy, président de l'Observatoire Cetelem. A l'exception de quelques pays, comme la Tchéquie, cette tendance est largement partagée. Y compris par la France, où la note est passée de 4,4 a 5,5/ 10.

Autre évolution positive, celle de la perception de sa propre situation. Chez les Européens, cette note-ci est passée de 5,7/ 10 en 2021 à 6,2 en 2022. « En France, la note monte fortement; elle passe de 5,9 a 6,3 », ajoute Flavien Neuvy. Dans l'Hexagone, cette tendance s'explique par la croissance économique, mais aussi par l'amélioration du marché de l'emploi. « Cela impacte directement le moral des Français », estime Flavien Neuvy, qui évoque un « stress par procuration ». Même des populations qui ne sont pas concernées directement par le chômage, comme les retraités ou les fonctionnaires, s'inquiètent pour leurs proches. En tout cas, au niveau européen, fruit de cette vision globalement positive de la situation, « les ménages ont envie d'augmenter leur niveau de dépenses », constate Flavien Neuvy. C'est le cas de 41% des Européens en 2022, contre 34% l'année précédente. Et en France, cette proportion est passée de 29 a 37%. « Les Français ont envie de se changer les idées, de se faire plaisir », analyse l’expert, qui observe des intentions d'achat particulièrement importantes pour les produits de voyage et de loisirs. Alors, si un retournement de situation est toujours possible, l'hypothèse la plus probable, pour l'Observatoire Cetelem, est bien celle d'une forte consommation.

Les dépenses contraintes et "pré-engagées" : 40% du budget familial

Pour autant, l'épargne n'est pas délaissée. Crise oblige, celle-ci a atteint des taux très importants partout en Europe (France comprise). « Il s'agit d'une épargne contrainte. Tout l'enjeu, maintenant, est de savoir si elle va revenir dans l'économie », analyse Flavien Neuvy. Or, pour l'instant, les intentions d'épargne demeurent élevées. Plus de la moitié des Européens (54%, un taux stable entre 2021 et 2022) déclarent vouloir accroître leur niveau d’épargne. En France, le taux est passé de de 40 à 44%. « Le retour de l'inflation, la hausse des prix des carburants inquiètent les ménages. La tentation de conserver une épargne de précaution est grande pour faire face à une hausse des prix qui pourrait perdurer », estime l’expert.

Dans cette équation, un autre paramètre compte : celui de la perception du pouvoir d'achat. Or, cette année, plus du tiers des Européens et 40% des Français considèrent qu'il a baissé. En toile de fond, près de neuf Européens sur dix, - et autant de Français- ont le sentiment que les prix ont augmenté. Au delà des faits avérés, en matière de pouvoir d'achat, il subsiste toujours un décalage entre perception et statistiques. Pour Flavien Neuvy, un partie de l'explication de ce décalage réside dans l'augmentation des dépenses « contraintes et pré-engagées ». Chez les ménages français, ces dernières sont passées de 35,6 à 40,1 % de leur budget entre 1992 et 2020. Parmi ces dépenses, « le poids numéro 1, c'est le logement », rappelle Flavien Neuvy. S'y ajoutent les frais en énergie, assurances, mais aussi Internet, abonnements TV... Malgré cela, « les dépenses plaisir résistent étonnamment bien », note-t-il. Leur part demeure stable autour de 17%. Au milieu, ce sont les dépenses du quotidien ( nourriture, vêtements...) qui ont diminué. Entre 1992 et 2020, leur part est passée de 42,7 à 37,6 % du budget. Mais un seuil incompressible semble avoir été atteint, d'après les projections de l'Observatoire, qui prévoit une quasi-stabilité de la répartition des dépenses en 2026.